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Avec un peu de retard, le temps de récupérer les photos et de laisser les souvenirs se poser, voici enfin mon debrief du BikingMan Corse 2025. Mon premier BikingMan de l’année… et oui, il y en aura d’autres.

Cette année, la préparation n’a pas été idéale. Pas beaucoup de longues sorties, un agenda chargé, du retard sur le matériel… J’aborde le départ avec à peine plus de 5000 km au compteur, dont une grande partie en VTT entre janvier et fin mars. Finalement, ça m’aura permis de bosser la vélocité et la souplesse, même si je manque clairement de longues sorties.

L’épreuve ? 983 km, 120 heures max, près de 20 000 m de D+. Un tour de Corse bien corsé. Une mise en bouche autour du Cap Corse avant de s’attaquer aux choses sérieuses. Plus de 28 ascensions sur le GPS : Col de Battaglia, le long col de Vergio, les aiguilles de Bavella, et quelques surprises signées Axel Carion, ces routes improbables, parfois à la limite du gravel, avec des pourcentages redoutables.

Jour 1 – Cap Corse, Battaglia et nuit glaciale

Départ à 11h30, par vagues successives. Le soleil est là. La météo s’annonce idéale pour toute l’épreuve.

Le tour du Cap Corse se passe à merveille. Les routes sont roulantes, les pourcentages doux. C’est exactement le type de profil qui me convient avec mes 90 kg. Seul inconvénient : les chenilles processionnaires. Il faut slalomer en permanence, certaines tombent des arbres, ça grouille sur la route.

Je garde le contrôle, je me bride sur les watts pour ne pas me cramer. La moyenne est élevée : plus de 27 km/h sur les 250 premiers kilomètres et les sensations sont bonnes.

Puis arrive le Col de Battaglia. Pentes à plus de 16 %, et tout de suite je comprends que mon braquet (42 / 10-44) va être limite. Je monte en cadence, en essayant de ne pas dépasser les 300-340 watts, mais très vite, mon dérailleur arrière m’annonce le fameux « BIP »… je suis déjà sur le plus petit rapport.

À partir de là, je n’ai plus aucune marge. Je grimpe en puissance, debout sur les pédales, et je ne suis pas le seul. Je double deux gars, deux autres me doublent. On est plusieurs à zigzaguer sur la route pour adoucir les pourcentages. C’est raide, mais l’ambiance est magique. Le soleil se couche, le ciel s’embrase, et la vue en bascule vers Bocca di Laggiarello est spectaculaire.

Je passe le CP1 à Olmi-Cappella (km 226) avec une heure d’avance sur mon plan. Je prends le temps de manger, remplir les bidons, souffler un peu. Puis je repars pour une descente très fraîche. Je dois m’arrêter pour enfiler ma doudoune et mes gants longs, le froid est mordant dans ces descentes nocturnes.

Cap ensuite sur le Col de Vergio. Près de 40 km d’ascension de nuit, mais avec un profil très roulant. J’enroule bien, je reprends un autre coureur, on échange quelques mots, puis je poursuis seul. Arrivé au sommet vers 2h45 du matin, un vent glacial souffle. J’enfile toutes mes couches, jambière, doudoune, buff… et je bascule.

La descente vers Porto est longue, plus de 30 km, et très froide. Je reste focus sur la ligne blanche centrale pour garder une trajectoire correcte. Les derniers kilomètres sont durs. Je croise deux sangliers, je commence à piquer du nez sur le vélo. Mon objectif : rejoindre Porto et dormir une heure.

En arrivant à Porto, je trouve une station-service avec une aire de lavage propre. Je cale mon vélo discrètement et m’installe sur une dalle, à l’abri du vent et des lampadaires. Je m’endors rapidement… mais seulement 14 minutes. Les crampes me réveillent. Je tente de me rendormir. Rien à faire. Je reste allongé, tourne dans tous les sens pendant une quarantaine de minutes. Je repars, sans avoir correctement dormi et en ayant perdu 1h.

Jour 2 – Explosion

La reprise est étonnamment bonne. Le lever de soleil sur les calanques de Piana me redonne un coup de boost. Je remonte vers Cargèse, tout est fermé. À Sagone, une station vient d’ouvrir, je fais le plein : eau, deux cocas, une collation.

Les sensations sont là. Les cols s’enchaînent, réguliers, pas trop raides. Mais dans les descentes, le froid est toujours aussi brutal.

Je passe le CP2 à Vero (km 465) vers 10h45. En repartant… je m’effondre. Littéralement. Une longue ascension sur piste vers le col de Scalella m’épuise. Je pose le pied à terre à trois reprises. Mon compteur se met en pause : je vais trop lentement. Un ami corse, Hervé, a fait la route depuis Porticcio pour me voir passer ; il m’attend au sommet. Il me voit arriver, je suis dans un sale état… Je prends deux minutes pour lui dire bonjour, puis je repars, essayant de ne pas perdre trop de temps.

Toute l’après-midi est un cauchemar. Je m’endors sur le vélo. Je perds la notion du temps. Je tente de dormir mais je ne trouve pas d’endroit calme, ni à l’ombre, ni isolé. Je suis vidé. Je grappille 7 minutes sur un banc d’arrêt de bus, pas mieux.

Puis, peu à peu, la Corse me rattrape. Je relève la tête. Le paysage me tire en avant. Je traverse Aullène, je m’arrête dans un bar pour faire le plein en eau.

La soirée approche. J’enchaîne les kilomètres, traverse Zonza, grimpe vers l’Ospedale. La nuit tombe. Le vent monte. L’humidité et les nuages aussi. Les sangliers font leur retour. Je les évite de justesse dans la descente vers Porto-Vecchio. Je crie dans le noir pour les faire fuir. J’ai jamais vu autant de bestioles en une seule nuit.

Je décide de ne pas tenter le passage des aiguilles de Bavella de nuit. Trop risqué. Trop usé de cette journée. Je trouve un hôtel à Solenzara. Sandwich, douche rapide, deux minuteurs : 60 min et 180 min. Je rate le premier. Je dors 3h.

Je perds quatre places. Mais j’ai récupéré.

Jour 3 – Renaissance

4h30, je repars. Les aiguilles de Bavella m’attendent. C’est raide. C’est long. Mais c’est beau. Lever de soleil sur les falaises. Je monte en essayant de me ménager un minimum, j’en prends plein les yeux.

Je croise Nicolas, un bikepacker. On discute un peu, puis nos routes se séparent. La journée est belle, les cols s’enchaînent bien. J’ai la forme. Je jongle encore entre doudoune et manches courtes, à chaque col… je perds trop de temps à me changer. Il faudra améliorer ça.

Le 8e est 20 km devant, le 10e, 20 km derrière. Je peux donc gérer et finir propre.

Entre Aléria et Talasani, je pensais pouvoir mettre du braquet. Axel (l’organisateur) avait d’autres idées. Des routes isolées, cassantes, usantes. Je suis content d’avoir mes pneus en 34 mm.

Les deux dernières ascensions sont un enfer. Je les redoutais. Elles ne m’ont pas déçu. Des pourcentages au-delà de 20 %, une route en lacets, interminable. Mais je suis dans ma bulle.

Dernier appel à mes enfants, à ma compagne. Je monte, lentement, mais je monte.

Dernière descente. Derniers kilomètres plats. Je pousse un peu en espérant arriver avant la fermeture du resto à côté du camping. Trop tard. Fermé.

Je passe la ligne vers 21h30. La cloche du BikingMan résonne, comme une délivrance. Un signal sonore qui clôt 2 jours 1/2 de lutte, de doutes, mais aussi de beauté. Axel est là, entouré des « Race Angels ». Les sourires, les accolades, les tapes sur l’épaule… Le rituel est bien rodé, mais sincère. L’équipe d’organisation est vraiment au top. Une dernière étreinte, quelques mots simples, mais justes. Une chaleur humaine qui suffit largement à faire monter l’émotion. Et la satisfaction profonde d’avoir tenu. D’avoir surmonté ce deuxième jour.

Matériel

J’ai pris le départ avec un Open UP un vélo gravel all-round qui s’est avéré être un excellent choix pour cette épreuve. Sain, stable, confortable, et surtout polyvalent avec sa grande tolérance au niveau des sections de pneus.

J’étais monté en 34 mm tubeless Schwalbe Pro One sur des roues ZIPP 303 Firecrest. Gros point fort : confort remarquable, très bon grip, et aucune prise au vent latéral dans les descentes. Pas une crevaison, pas un souci technique.

Côté transmission, j’avais choisi le SRAM XPLR 42 / 10-44, mais clairement, ce n’était pas suffisant. Sur les forts pourcentages, j’aurais eu besoin d’une vraie transmission de VTT, type mullet avec un 10-52. Le système électronique SRAM AXS reste excellent : une seule batterie aura suffi pour toute la course (j’en avais une deuxième en backup, jamais utilisée).

Freins à disque bien sûr. Incontournable sur ce type d’épreuve.

En bagagerie, j’ai utilisé du Cyclite, plutôt bien optimisé, même si je dois trouver une meilleure organisation pour pouvoir sortir la doudoune rapidement sans avoir à ouvrir le sac de selle ou retirer le Camelbak. C’est un point à travailler.

Compteur Garmin 1040. Bonne autonomie, ClimbPro super utile pour anticiper les montées, mais comportement erratique sur le recalcul des itinéraires : il s’est éteint 3 fois sans raison avec une erreur de 10 km de l’arrivée.

Côté confort : potence trop basse, guidoline trop fine. Résultat : gros écrasement du canal carpien et encore aujourd’hui, plusieurs semaines plus tard, les doigts restent engourdis. À revoir pour les prochaines.

Les prolongateurs que j’avais adorés au Maroc ne m’ont servi à rien ici. Trop peu de plat.

En éclairage :

  • Lampe frontale Decathlon Forclaz HL900 + batterie de rechange : excellente.
  • Éclairage avant Garmin Varia UT800 : pleine puissance pour les descentes.
  • Éclairage arrière radar Garmin Varia : utilisé uniquement sur les grands axes.
  • Éclairage arrière Decathlon SL110 : 50h d’autonomie pour moins de 4€, top pour le prix.

Doudoune Decathlon Forclaz : parfaite pour les longues descentes glaciales et pour dormir à même le sol.

Côté audio, j’ai utilisé le casque Shokz Open Run Pro 2. Parfait pour téléphoner à ma petite famille lors des longues montées, très confortable. Je pense charger des podcasts pour les prochaines épreuves. Je n’écoute pas de musique car j’aime ressentir l’ambiance de l’environnement, surtout la nuit.